Au printemps des monstres
- philippe Jaenada
- biographie
- documentaire
- noir
- Polar
- Policier
- Récit de vie
- Roman
Le résumé
Ce n’est pas de la tarte à résumer, cette histoire. Il faut procéder calmement. C’est une histoire vraie, comme on dit. Un garçon de onze ans est enlevé à Paris un soir du printemps 1964. Luc Taron. (Si vous préférez la découvrir dans le livre, l’histoire, ne lisez pas la suite : stop !) On retrouve son corps le lendemain dans une forêt de banlieue. Il a été assassiné sans raison apparente. Pendant plus d’un mois, un enragé inonde les médias et la police de lettres de revendication démentes, signées « L’Étrangleur » ; il adresse même aux parents de l’enfant, horrifiés, des mots ignobles, diaboliques, cruels. Il est enfin arrêté. C’est un jeune homme banal, un infirmier. Il avoue le meurtre, il est incarcéré et mis à l’écart de la société pour le reste de sa vie. Fin de l’histoire. Mais bien sûr, si c’était aussi simple, je n’aurais pas passé quatre ans à écrire ce gros machin (je ne suis pas fou). Dans cette société naissante qui deviendra la nôtre, tout est trouble, tout est factice. Tout le monde truque, ment, triche. Sauf une femme, un point de lumière. Et ce qu’on savait se confirme : les pervers, les fous, les odieux, les monstres ne sont pas souvent ceux qu’on désigne.
La critique du Chat Botté
Quelles montagnes russes que ce roman ! Un livre « monstrueux » – 750 pages, un sacré morceau. D’autant plus que la narration est assez particulière chez Jaenada, avec un style « journalistique » sans vraiment d’action ou de dialogues, par exemple, et surtout énormément de digressions; à de nombreux égards, ce livre est très long. Pourtant, je n’ai pas vu le temps passer en le lisant et il a réussi le tour de force de me tenir en haleine jusqu’au bout.
L’auteur prend pour thème une affaire ayant vraiment eu lieu en 1964, le meurtre du petit Luc Taron, 11 ans. Attention, comme il s’agit d’une histoire vraie, je vous déconseille fortement de vous renseigner dessus ou de vérifier ce qui est dit dans le roman: laissez-vous surprendre ! Jaenada nous ballade à travers cette affaire, nous mène en bateau en creusant toujours plus dans un meurtre où tout ce qui vous paraîtra aller de soi va toujours se révéler plus déroutant. Si vous aimez tout ce qui est vidéos et podcasts de « true crime » (documentaires criminels, enquêtes réelles sur des histoires de meurtres et de disparitions), vous allez adorer ce roman ! L’auteur prend réellement la place d’un enquêteur et creuse toujours plus profondément pour nous donner une myriade de détails et faits techniques dont le lecteur doit lui-même retrouver le sens et la pertinence, tout en distinguant les vérités des fausses pistes…
Au-delà d’un récit de meurtre, il s’agit d’une histoire sur la monstruosité, et sur comment elle peut se retrouver là où on ne l’attend pas; mais aussi sur le traitement médiatique des affaires criminelles, la fascination du public pour le glauque, et la facilité d’attribuer la noirceur du monde à des « fous ». C’est un livre complètement ancré dans le réel qui vous retournera le cerveau dans tous les sens.
Et bien entendu, difficile de conclure sans mentionner le style du roman qui, malgré son approche journalistique, se permet un ton sarcastique, parfois franchement drôle même, qui allège la lecture et la rend d’autant plus plaisante.
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